Page:Gautier - La Conquête du paradis.djvu/320

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trésor, car elle était pleine jusqu’au bord de magnifiques pierreries, brutes ou taillées, mais sans montures. Rubis, émeraudes, perles, saphirs, turquoises, qui se mêlaient aux merveilleux diamants de Golconde.

À l’intérieur du couvercle était fixé par un ruban un parchemin roulé, Bussy le prit et le déroula. C’était l’acte, scellé du sceau royal, qui l’instituait légitime possesseur de ce palais, avec ses dépendances, ses droits, ses revenus, les esclaves, les trésors et tout ce qu’il contenait. Il referma le coffre en poussant un profond soupir. Sa haine, pour son tout-puissant rival, chancelait devant tant de générosité ; toutes ces richesses, tous ces honneurs ne le faisaient-ils pas l’égal d’une reine ? Pourtant celui qui le comblait ainsi restait pour lui l’obstacle, l’ennemi.

Sous la main du hadjib le vitrail s’était écarté, et par la large baie on découvrait le paysage. De ce point, la vue s’étendait à l’infini, sous le ciel incandescent.

C’était d’abord comme une mer de verdure où la ville était submergée ; les terrasses de marbre et les palais y formaient des îles ; les coupoles des mosquées, les fins minarets, si audacieusement élevés, dominaient tout ce moutonnement d’arbres, que les remparts, entrecoupés de grosses tours rondes, enfermaient d’une ceinture claire. Puis, au delà d’Aurengabad, la plaine, où frissonnait une poussière d’or, apparaissait avec ses vallonnements, ses cultures, ses cours d’eau, et, tout au loin, des montagnes, couleur de lapis et d’améthyste, fermaient l’horizon.