Page:Gautier - La Conquête du paradis.djvu/389

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colère cet homme qui, peut-être, venait briser sa joie.

Le marquis lut tout haut la lettre composée de quelques lignes, écrites fiévreusement de la main du roi.

« Reviens vite, mon Bussy, nous sommes perdus ! Les Mahrattes ont envahi le Dekan et menacent Aurengabad. »

— Hélas ! ce malheureux pays ne cessera donc pas d’être une proie convoitée de tous ! s’écria le jeune homme en jetant à Ourvaci un regard désolé.

Elle se tordait les mains en murmurant d’un air égaré :

— Les Mahrattes !

— Eh bien, dit Bussy en souriant, qu’ont-ils donc de si terrible ? S’ils ne m’arrachaient pas à un bonheur céleste, ils m’inquiéteraient fort peu.

— Seigneur, dit Lila, c’est par eux qu’Ourvaci est orpheline. Avant que la gloire des Français ait tout effacé dans l’Hindoustan, les Mahrattes passaient pour les plus braves et les plus redoutables des guerriers. Rien ne leur résistait et leur nom seul faisait fuir les armées.

— Leur défaite manquait à notre renommée, dit-il, et il est bon que l’orgueil et l’insolence de ce peuple soient humiliés. Je t’en conjure, ma reine, ajouta-t-il en voyant qu’Ourvaci baissait la tête avec accablement, aie plus de confiance dans nos armes. La bravoure des Mahrattes ne pourra rien contre une bravoure égale, soutenue par une artillerie tellement supérieure, qu’ils disent tous ici que nous avons la foudre pour alliée.