Page:Gautier - La Conquête du paradis.djvu/421

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laisserait deviner, évitant ainsi l’ennui de solliciter des faveurs et se les faisant offrir.

Aussi, quand il entendit Bussy parler d’un traître tout proche du roi, le ministre s’élança-t-il vers le jeune Français, s’agenouillant presque à ses pieds.

— Glaive de l’État ! s’écria-t-il, en déroulant un firman scellé du sceau royal, la Lumière du Monde a trouvé, comme moi, que les troubles qui se sont produits parmi les troupes sous tes ordres, à propos des soldes non payées, ne devaient plus se renouveler, et elle donne aux Français, sur la côte orientale de l’Inde, les quatre provinces de Rajamendry, d’Ellore, de Chicacole et de Nastafanagar, dont les revenus suffiront amplement à l’entretien de l’armée, et l’assureront contre tout événement.

— C’est bien, dit Bussy, qui prit le traité et le passa à son secrétaire, après l’avoir lu ; il est juste que ceux qui défendent le royaume soient les premiers payés de leurs peines.

Seid-el-Asker-Khan, jugeant le terrible général apaisé pour quelque temps, poussa un profond soupir de soulagement, comme un homme étranglé à demi à qui l’on rendrait le souffle.

Lorsque Bussy apparut sur son cheval, à la droite du roi, et traversa le camp pour rentrer dans la ville, la foule se pressa, heureuse de le voir, mais beaucoup de musulmans se disaient les uns aux autres, avec un frisson de peur :

— On voit bien qu’il n’est pas vivant ; c’est un fantôme ; il disparaîtra brusquement quand il aura franchi la porte de son palais.