Page:Gautier - La Conquête du paradis.djvu/57

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un précieux renfort qui nous arrive de France, et veut bien me faire l’honneur d’être mon ami.

— M. de Bussy est le très bien venu, dit-elle, il est notre ami puisqu’il est le vôtre.

Et elle lui tendit une jolie main blanche effilée que Bussy porta à ses lèvres.

Mme Barnwal était toute jeune, gracieuse, élégamment vêtue, une rose rouge sur ses cheveux poudrés à frimas, et une mouche au coin de sa jolie bouche.

— Quelle affreuse affaire, n’est-ce pas, monsieur ? dit-elle à Bussy. Jamais on n’a vu pareille obstination. Mais venez que je vous présente nos députés.

Tous les assistants vinrent saluer le jeune officier. C’étaient : le major général de Bury, dont le costume bleu à parements rouges, orné de brandebourgs d’or, attirait spécialement les regards ; le procureur général Bruyère, l’ingénieur Paradis, un soldat d’origine suisse, vaillant et doux ; d’Espréménil, Barthélémy, Dulaurens, membres du conseil supérieur de Pondichéry, de La Touche, Changeac, et enfin M. Friel, l’interprète, l’homme de confiance de Dupleix.

M. d’Espréménil, qui était une nature fougueuse et énergique, paraissait fort animé ; il venait de faire une proposition que ses collègues, plus timorés, ne sanctionnaient pas : c’était d’arrêter immédiatement ce commandant révolté qui refusait d’obéir au gouverneur de l’Inde française.

— Est-ce qu’il n’a pas eu le premier l’idée d’attenter à la liberté de Mme Barnwal, disait-il, sachant quel précieux otage il aurait entre les mains ? n’est-ce pas la guerre déclarée, la révolte ouverte ?