Page:Gautier - La Peau de tigre 1866.djvu/323

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

hommes désapprenaient : on pouvait arriver à confondre, ce qui n’eût pas été possible autrefois, un marquis et un bourgeois.

Ces mœurs, qui furent celles de la Restauration, et surtout du règne de Louis-Philippe, ne se sont pas encore sensiblement modifiées : elles avaient pris, ces dernières années, une tendance anglaise qui se changera peut-être, à cause des idées nouvelles, en tendance américaine ; on peut donc les admettre, temporairement, comme le milieu où doit se mouvoir le parfait gentleman dont nous voulons tracer ici les principaux caractères.

C’est peut-être une tentative singulière, au moment où les idées d’égalité et de nivellement sont à l’ordre du jour, de chercher à donner la définition du parfait gentleman, ou, pour parler français, ce qui ne nuit jamais, de l’homme du monde, de l’homme comme il faut ; mais n’est-ce pas lorsque les classes sont détruites qu’il faut chercher à relever l’individu ? Si l’aristocratie de naissance a perdu ses privilèges, si l’aristocratie de fortune doit perdre les siens et les barons de l’écu aller rejoindre les barons à écu ; si même l’aristocratie du talent, cette noblesse conférée par Dieu, et la seule acceptable, choque encore la