Page:Gautier - La Peau de tigre 1866.djvu/345

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coulis de pénétrer et de caresser trop aigrement les épaules nues des élèves ; deux fenêtres éclairent cette vaste pièce d’un aspect sévère et triste, qu’on prendrait plutôt pour une salle d’attente de présidial ou de couvent que pour l’école des ris et des jeux. Le long des murs sont plantés des crampons de fer et des traverses de bois, dont il serait difficile à un bourgeois naïf de deviner la destination, et qui ont de vagues ressemblances avec les instruments de torture et les chevalets d’estrapade du moyen âge ; n’était la bonne et honnête figure du professeur, tranquillement assis, sa pochette à la main, l’on ne serait pas trop rassuré.

La leçon va commencer. Le rat, muni d’un petit arrosoir de fer-blanc peint en vert, fait tomber une pluie fine et grésillante sur la place qu’il doit occuper, pour abattre la poussière et dépolir le parquet. C’est une politesse de bon goût que d’arroser le carré d’une amie ou d’une rivale : cette attention se reconnaît par un salut dans toutes les règles. Les mères, flanquées de leur inséparable cabas, sont reléguées sur une étroite banquette de velours d’Utrecht placée du côté de la glace. Au signal de la pochette, le rat enlève et jette à sa dueña le mouchoir ou le fichu qui lui couvre les épaules.