Page:Gautier - La Peau de tigre 1866.djvu/354

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vie, sont favorables aux développements des femmes et à la santé. Plus d’une jeune fille vertueuse, timide bouton éclos à l’ombre du rosier maternel, envierait la fraîcheur et le velouté des joues du rat le plus immoral.

Nous devons dire qu’une tendance nouvelle se manifeste dans les mœurs des coulisses. Naguère, le rat allait et venait toujours seul, rentrait ou ne rentrait pas, sans que madame sa mère y prît garde le moins du monde ; maintenant, la mère et la fille ont compris que la sagesse rapportait plus que le vice, et que l’innocence d’une jeune vierge de seize ans valait mieux que le libertinage d’un enfant de treize ans. Tous les marchés d’esclaves ne sont pas en Turquie : ici, à Paris même, au milieu du xixe siècle, il se vend plus de femmes qu’à Constantinople. Plus la sagesse de l’enfant est notoire, plus les enchères montent haut ; il y en a qui vont jusqu’à soixante mille francs. Avec cette somme, on aurait en toute propriété une demi-douzaine, et même plus, de Géorgiennes, de Circassiennes, de femmes jaunes de Golconde et de négresses de Damanhour.

L’appât de quatre ou cinq louis déterminait autrefois ces vertueuses mères à prêter leurs filles pour des sou-