Page:Gautier - Le Roman de la momie, Fasquelle, 1899.djvu/276

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Quand elle se présenta à la porte du palais, les soldats ne la battirent plus comme la première fois ; elle avait déjà du crédit, et l’oëris de garde la fit entrer tout de suite. Timopht la conduisit au Pharaon.

Lorsqu’il aperçut l’immonde vieille qui rampait vers son trône comme un insecte à moitié écrasé, le roi se souvint de sa promesse et donna ordre qu’on ouvrît une des chambres de granit à la Juive, et qu’on l’y laissât prendre autant d’or qu’elle en pourrait porter.

Timopht, en qui Pharaon avait confiance et qui connaissait le secret de la serrure, ouvrit la porte de pierre.

L’immense tas d’or étincela sous un rayon de soleil ; mais l’éclair du métal ne fut pas plus brillant que le regard de la vieille ; ses prunelles jaunirent et scintillèrent étrangement. Après quelques minutes de contemplation éblouie, elle releva les manches de sa tunique rapiécée, mit à nu ses bras secs dont les muscles saillaient comme des cordes, et que plissaient à la saignée d’innombrables rides ; puis elle ouvrit et referma ses doigts recourbés, pareils à des serres de griffon, et se lança sur l’amas de sicles d’or avec une avidité farouche et bestiale.