Page:Gautier - Le Roman de la momie, Fasquelle, 1899.djvu/305

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rebrousser les chars, renversaient le passant isolé et le recouvraient bientôt ; leur formidable armée, sautelant et battant de l’aile, s’avançait sur l’Égypte, des Cataractes au Delta, occupant une largeur immense, fauchant l’herbe, réduisant les arbres à l’état de squelettes, dévorant les plantes jusqu’à la racine, et ne laissant derrière elle qu’une terre nue et battue comme une aire.

À la prière du Pharaon, Mosché fit cesser le fléau ; un vent d’ouest, d’une violence extrême, emporta toutes les sauterelles dans la mer des Algues ; mais ce cœur obstiné, plus dur que l’airain, le porphyre et le basalte, ne se rendit pas encore.

Une grêle, fléau inconnu à l’Égypte, tomba du ciel, parmi des éclairs aveuglants et des tonnerres à rendre sourd, par grêlons énormes, hachant tout, brisant tout, rasant le blé, comme l’eût fait une faucille ; puis, des ténèbres noires, opaques, effrayantes, où les lampes s’éteignaient comme dans les profondeurs des syringes privées d’air, étendirent leurs nuages lourds sur cette terre d’Égypte si blonde, si lumineuse, si dorée sous son ciel d’azur, dont la nuit est plus claire que le jour des autres climats. Le peuple, épouvanté, se