Page:Gautier - Le Roman de la momie, Fasquelle, 1899.djvu/309

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— Moi, l’invincible, n’ai-je pas été vaincu ? répondit Pharaon. À quoi sert que les bas-reliefs des temples et des palais me représentent armé du fouet et du sceptre, poussant mon char de guerre sur les cadavres, enlevant par leurs chevelures les nations soumises, si je suis obligé de céder aux sorcelleries de deux magiciens étrangers, si les dieux, auxquels j’ai élevé tant de temples immenses bâtis pour l’éternité, ne me défendent pas contre le Dieu inconnu de cette race obscure ? Le prestige de ma puissance est à jamais détruit. Mes hiéroglyphites réduits au silence m’abandonnent ; mon peuple murmure ; je ne suis plus qu’un vain simulacre ; j’ai voulu, et je n’ai pas pu. Tu avais bien raison de le dire tout à l’heure, Tahoser ; me voilà descendu au niveau des hommes. Mais puisque tu m’aimes maintenant, je tâcherai d’oublier, et je t’épouserai quand seront terminées les cérémonies funèbres. »

Craignant de voir le Pharaon revenir sur sa parole, les Hébreux se préparaient au départ, et bientôt leurs cohortes s’ébranlèrent, conduites par une colonne de fumée pendant le jour, de flamme pendant la nuit. Elles s’enfoncèrent dans les solitudes sablonneuses entre le Nil et la