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LE TROISIÈME RANG DU COLLIER

par Lucerne et fera une visite à Wagner. Richter est déjà à Tribschen et Schuré y va aussi.

Nous restons les derniers à Munich, malgré les lettres anonymes que nous recevons journellement, et qui nous menacent, si nous ne nous en allons pas, de toutes sortes de représailles : « C’est vous qui avez empêché le théâtre d’exécuter les ordres du roi ; vous êtes les valets d’un traitre, traîtres vous-mêmes… On ne peut endurer plus longtemps, etc… » Nous n’avons pas la moindre peur.

Cosima m’a raconté qu’il fut un temps où elle recevait, à Munich, quatre ou cinq lettres anonymes par jour, dans lesquelles on jurait sa mort en la traitant d’« espionne prussienne ».

Nous restons, surtout, pour laisser passer ce flot de visiteurs, là-bas, et ne pas encombrer la délicieuse retraite. Cependant on nous appelle avec une insistance si charmante et si affectueuse, en nous annonçant qu’il n’y a plus personne, que nous nous décidons soudain.

Et, face à l’ennemi, nous quittons Munich, sans rancune contre cette jolie ville, où nous avons reçu, de tous ceux qui n’étaient pas affiliés à la cabale des courtisans, le plus sympathique et le plus cordial accueil.