Page:Gautier - Le Vieux de la montagne, Armand Colin et Cie, 1893.djvu/142

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Guillaume la lettre à Raschid ed-Din. Il la tenait à la main, et l’on voyait osciller, au bout d’un ruban blanc, le sceau royal empreint sur la cire rouge.

Amaury s’arrêta sur le seuil de sa tente, sans prendre garde aux acclamations dont on le saluait.

Le merveilleux château du prince des Sept-Montagnes fascinait ses regards. Il s’élevait au delà d’une colline rocheuse qui bordait la vallée du côté du camp, et il fallait se renverser la tête pour voir son faîte, qui, recevant déjà toute la lumière du soleil, montrait des coupoles d’or, des tours et des tourelles, des murs dentés de créneaux, où des gemmes incrustées scintillaient et jetaient des flammes. Le roi mesurait de l’œil cette vertigineuse paroi que le rocher à pic prolongeait jusqu’au fond d’un gouffre. Elle était lisse et tout unie, à l’exception d’une voûte large et haute qui la perçait au niveau de la colline et que le pont-levis relevé masquait à demi. Amaury soupirait en se disant qu’assiéger ce château formidable serait une folie bien vaine et que, si les avances du Vieux de la Montagne cachaient un piège, il regrettait amèrement de s’y être laissé prendre.