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LES CHOSES SE COMPLIQUENT.

privauté à ce fat que je déteste déjà de toute mon âme.

— On voit bien que vous ne la connaissez point, reprit maître Bilot ; c’est une hermine qui aimerait mieux mourir qu’avoir une tache en son blanc pelage. Quand la comédie exige des embrassades, on la voit rougir à travers son fard et parfois s’essuyer la joue avec le dos de la main.

— Vivent les beautés altières, farouches et rebelles au montoir ! s’écria le duc, je la cravacherai si bien qu’il faudra qu’elle prenne le pas, l’amble, le trot, le galop, et fasse toutes les courbettes à ma volonté.

— Vous n’en obtiendrez rien de cette manière, monsieur le duc, permettez-moi de vous le dire, fit maître Bilot en faisant un salut empreint de la plus profonde humilité, comme il convient à un inférieur qui contredit un supérieur séparé de lui par tant de degrés de l’échelle sociale.

— Si je lui envoyais dans un bel étui de chagrin des pendeloques à grosses perles, un collier d’or à plusieurs rangs avec fermoirs en pierreries, un bracelet en forme de serpent ayant deux gros rubis balais pour yeux !

— Elle vous renverrait toutes ces richesses en répondant que vous la prenez sans doute pour une autre. Elle n’est point intéressée comme la plupart de ses compagnes, et ses yeux, chose rare pour une femme, ne s’allument pas aux feux de la joaillerie. Elle regarde les diamants les mieux enchâssés comme si c’étaient nèfles sur paille.