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LE CAPITAINE FRACASSE.

— Que voilà un étrange et fantasque échantillon de sexe féminin ! dit le duc de Vallombreuse un peu étonné ; sans doute, elle veut par ces semblants de sagesse se faire épouser de ce maraud, lequel doit être abondamment pourvu de biens. Le caprice prend quelquefois à ces créatures de faire souche d’honnêtes gens et de s’asseoir aux assemblées parmi les prudes femmes, l’œil baissé sur la modestie, avec un air de Sainte N’y touche.

— Eh bien, épousez-la, fit Vidalinc en riant, s’il n’y a pas d’autre moyen. Ce titre de duchesse humanise les plus revêches.

— Tout beau ! tout beau ! reprit Vallombreuse, n’allons pas si vite en besogne ; il faut d’abord parlementer. Cherchons pour aborder la belle quelque stratagème qui ne l’effarouche pas trop.

— Cela est plus facile que de s’en faire aimer, dit maître Bilot ; il y a ce soir au jeu de paume répétition de la pièce qu’on doit jouer demain ; quelques amateurs de la ville seront admis, et vous n’avez qu’à vous nommer pour que la porte s’ouvre à deux battants devant vous. D’ailleurs j’en toucherai deux mots au seigneur Hérode, qui est fort de mes amis et n’a rien à me refuser ; mais, selon ma petite science, vous auriez mieux fait d’adresser vos vœux à mademoiselle Sérafine, qui n’est pas moins jolie qu’Isabelle et dont la vanité se fût pâmée de plaisir à cette recherche.

— C’est d’Isabelle que je suis affolé, fit le duc d’un petit ton sec qu’il savait prendre admirablement et