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LA BAGUE D’AMÉTHYSTE.

Il avisa le perron gardé par les deux sphinx de pierre et jugea fort sainement que cette entrée architecturale conduisait aux plus riches salles du logis, où sans doute Vallombreuse avait mis la jeune comédienne et où devait s’agiter la bataille en l’honneur de cette Hélène sans Ménélas et vertueuse surtout pour Pâris. Les sphinx ne firent pas mine de lever la griffe pour l’arrêter au passage.

La victoire semblait restée aux assaillants. Bringuenarilles, Tordgueule et Piedgris gisaient sur le plancher comme veaux sur la paille. Malartic, le chef de la bande, avait été désarmé. Mais en réalité les vainqueurs étaient captifs. La porte de la chambre, fermée en dehors, s’interposait entre eux et l’objet de leur recherche, et cette porte, d’un chêne épais, historiée d’élégantes ferrures en acier poli, pouvait devenir un obstacle infranchissable à des gens qui ne possédaient ni haches ni pinces pour l’enfoncer. Sigognac, Lampourde et Scapin appuyant l’épaule contre les battants s’efforçaient de la faire céder, mais elle tenait bon et leurs vigueurs réunies y mollissaient.

« Si nous y mettions le feu, dit Sigognac, qui se désespérait, il y a des bûches enflammées dans l’âtre.

— Ce serait bien long, répondit Lampourde ; le cœur de chêne brûle malaisément ; prenons plutôt ce bahut et nous en faisons une sorte de catapulte ou bélier propre à effondrer cette barrière trop importune. »

Ce qui fut dit fut fait, et le curieux meuble ouvragé de délicates sculptures, empoigné brutalement et lan-