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LA BAGUE D’AMÉTHYSTE.

Malartic, Lampourde et Scapin regardaient avec admiration cette lutte d’un intérêt si vif d’où dépendait le sort de la bataille, les chefs des deux partis opposés étant en présence et combattant corps à corps. Même Scapin avait apporté les flambeaux de l’autre chambre pour que les rivaux y vissent plus clair. Attention touchante !

« Le petit duc ne va pas mal, dit Lampourde appréciateur impartial du mérite, je ne l’aurais pas cru capable d’une telle défense ; mais s’il se fend, il est perdu. Le capitaine Fracasse a le bras plus long que lui. Ah ! diable, cette parade de demi-cercle est trop large. Qu’est-ce que je vous disais ? voilà l’épée de l’adversaire qui passe par l’ouverture. Vallombreuse est touché ; non, il a fait une retraite fort à propos. »

Au même instant un bruit tumultueux de pas qui approchaient se fit entendre. Un panneau de la boiserie s’ouvrit avec fracas, et cinq ou six laquais armés se précipitèrent impétueusement dans la salle.

« Emportez cette femme, leur cria Vallombreuse, et chargez-moi ces drôles. Je fais mon affaire du Capitaine ; » et il courut sur lui l’épée haute.

L’irruption de ces marauds surprit Sigognac. Il serra un peu moins sa garde ; car il suivait des yeux Isabelle tout à fait évanouie que deux laquais, protégés par le duc, entraînaient vers l’escalier, et l’épée de Vallombreuse lui effleura le poignet. Rappelé au sentiment de la situation par cette éraflure, il porta au duc une botte à fond qui l’atteignit au-dessus de la clavicule et le fit chanceler.