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les cruautés de l’amour

doubles carreaux des fenêtres, elles regardaient passer le traîneau avec une vive curiosité.

André retint ses chevaux en passant devant l’église, qui dressait ses cinq clochetons surmontés de coupoles bulbeuses et brillantes de givre.

— Qu’elle est petite ! dit Clélia.

Un moujik s’était arrêté au coin de la place.

— Ah ! André Ivanovitch ! s’écria-t-il, c’est là ta cousine ? Est-elle blanche ! est-elle jolie ! On voit bien qu’elle n’est pas d’ici.

— Comme tout se sait vite au village, dit André. Ce vieux-là n’est pourtant pas curieux.

Un instant après ils se croisèrent avec une jeune fille, qui cria :

— Bonjour, Androwcha !

— C’est Akoulina, dit le jeune homme.

Clélia se retourna vivement.

— Tu la trouves jolie ?

— C’est la plus jolie fille du village, dit André.

— Je l’ai mal vue ; n’a-t-elle pas les yeux gris ?

— Non, ils sont noirs comme les vôtres.

— Est-ce qu’elle me ressemble par hasard ?

— Oh ! non, dit André sans regarder Clélia ; vous êtes plus belle.

Un sourire creusa dans la joue de Clélia cette jolie fossette qui lui allait si bien ; et elle regarda