Page:Gautier - Les Grotesques, 1856.djvu/114

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et, n’étant hardi que de ma timidité, s’adventura de me tendre les pièges dont il se trouve enveloppé. Il avait à sa dévotion un prévost de connétablie, nommé Leblanc, son confident particulier. Celui-là prit un tel soin de lui rendre cette complaisance, et se trouva si puissant dans cette commission, qu’une place qui peut soutenir des sièges royaux se trouva foible pour ma protection. Ce religieux, qui disposa si absolument de cet officier de justice, et qui trouva le gouverneur de votre citadelle si facile, c’est, sire, le Père Voisin, jésuite, qui, par une fantaisie déréglée et par un caprice très-scandaleux, s’est jeté dans la vengeance d’un tort qu’il n’a point reçeu, et s’est forgé des sujets d’offense pour avoir prétexte de me haïr… Cet homme-là est égaré de son sens et très-ignorant du mien ; il a fait glisser dans des âmes foibles une fausse opinion de mes mœurs et de ma conscience ; et, prostituant l’autorité de sa robe à l’extravagance de la passion, il a fait esclat de toutes ces infâmes accusations dont il fait aujourd’hui pénitence ; il a pénétré tous les lieux des cognoissances et des miennes, pour y répandre la mauvaise odeur qui avait rendu ma réputation si odieuse ; il a suborné le zèle d’un Père estourdy, qui a vomi tout un volume pour descharger la bile de son compaignon : c’est l’auteur de la Doctrine curieuse

« Voilà comme cestui-cy faisoit couler ses profanations à l’aide de l’ignorance publique… Voicy encore qu’un autre crioit en chaire, à gorge déployée : « Lisez le révérend Père Garassus ! je vous dis que vous le lisiez ; c’est un très-bon livre ! » Et dès que je fus conduit en cette ville, il orna un de ses sermons de cette équipée :