Page:Gautier - Les Grotesques, 1856.djvu/246

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plus risible. — Le brave poète se montre beaucoup moins inquiet de voir sa femme malade que de voir son bûcher et son vin au plus bas : il y a là-dedans quelque chose de naïvement et de cruellement propriétaire qu’il serait très-difficile d’attraper. Cette femme était demoiselle Marie Prunelle, et l’on apprend par le tombeau de quatre vers que lui adressa son mari, qu’elle mourut en l’an 1641, c’est-à-dire l’année même où cette précédente épigramme a été composée. Elle avait été sa servante, car Colletet avait la maladie de prendre des maîtresses ou des femmes parmi ses servantes, et plus tard il épousa encore Claudine le Hain, sa chambrière.

L’année 1651 et 1652 furent deux années fatales pour Colletet : il se trouva tellement dénué qu’il fut obligé de mettre en gage le bel Apollon d’argent, source de tant de concetti.


Si voyant nos exploits divers
Je ne compose plus de vers,
C’est que, pour subsister et nourrir mon ménage,
J’ay mis mon Apollon et mes Muses en gage.


Son fils, qui avait pris du service, fut fait prisonnier en Espagne, où il resta près de trois ans. — Dans son traité de la poésie morale, Colletet père, parlant des quatrains de François Colletet intitulés les Entretiens de la semaine sainte, du latin du révérend père dont Dominique, chartreux, s’en exprime ainsi, avec une sensibilité tout à fait touchante : « Sans flatterie, ces quatrains sont tels, dit-il, que, comme leur jeune auteur y exhorte les pécheurs à la pénitence, il ne doit pas se repentir de