Page:Gautier - Les Grotesques, 1856.djvu/266

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neurs rendus à ce grand poète, désira pour son fils une gloire pareille, et comme quelques mères qui vouent leurs enfants au blanc, elle voua le sien à la poésie : idée belle et touchante, — noble souhait qui méritait d’être accompli !

On donna à l’enfant la plus belle éducation ; il eut d’abord pour maître un régent particulier qui enseignait chez les Carmes-Billettes ; — puis il fut mis en pension chez Frédéric Morel, doyen des lecteurs du roi, dont la maison était alors l’école la plus célèbre de l’Université. Outre les leçons de cet habile maître, il allait prendre celles de Valens au collège Montaigu, et au collège de Cluni, celles de Nicolas Bourbon, le fameux poète latin. — Il fit ensuite un cours de philosophie au collège de Lisieux, et en même temps il apprit sans maître l’espagnol et l’italien qu’il posséda parfaitement. Il entreprit aussi l’étude de la médecine, mais il l’abandonna ensuite.

Malgré son application et l’excellence des maîtres, ses progrès furent lents quoique réels, car c’était un esprit droit ; exact, mais peu soudain, s’ouvrant avec difficulté, et à qui, entre autres qualités, manquaient principalement l’imagination et la fougue. — Le beau portrait gravé par Nanteuil, et dessiné d’après nature, prouverait victorieusement que Jean Chapelain ne pouvait remplir les intentions de sa mère, si la Pucelle et les vers satiriques de Boileau laissaient le moindre doute à ce sujet.

— C’est une tête austère, sobre, avec quelques grandes rides scientifiques pleines de grec et de latin, des rides qui ressemblent à des feuillets de livre ; le front est élevé, mais peu large ; les extrémités des sourcils serrent de