Page:Gautier - Les Grotesques, 1856.djvu/295

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nétable héréditaire de Normandie ; et après le Je chante et l’invocation de rigueur, on tombe comme dans la Jérusalem délivrée, où le début est suivi de vers à la louange d’Alphonse d’Est, sur une tirade qui commence ainsi :

Auguste successeur de cet auguste prince…

Madame la duchesse de Longueville, qui apparemment avait le goût meilleur que son mari, ayant entendu une lecture de la Pucelle, ne put s’empêcher de dire : « Cela est parfaitement beau, mais cela est parfaitement ennuyeux… » Certes, il fallait être duchesse et grande dame comme elle était pour oser dire quelque chose d’une audace aussi inouïe. Car la Pucelle eut d’abord un succès énorme, — et il ne s’en fit pas moins de six éditions, en dix-huit mois ; — c’est beaucoup. — La première édition est in-folio, imprimée en lettres italiques, avec le portrait du duc de Longueville, celui de Chapelain par Nanteuil, — et une planche à chaque chant, plus des têtes de pages, des lettres ornées, des culs-de-lampe, et des cartouches renfermant les armes du noble Mécène. Les dessins sont de Vignon, et la gravure a été payée 1800 livres à Abraham Bosse, célèbre ouvrier du temps. On voit qu’on n’y avait rien épargné. Le volume, d’après lequel je fais cette description, offre une particularité assez curieuse : c’est l’exemplaire même donné par Chapelain à mademoiselle de Scudéry ; la première page porte la dédicace disposée ainsi :


Pour Mademoiselle de SCUDÉRY,
son très-humble serviteur,
Chapelain.