Page:Gautier - Les Grotesques, 1856.djvu/417

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une figure charmante, une délicieuse personnification de la poésie. Qui de nous d’ailleurs n’a suivi comme le Destin, en imagination du moins, dans les routes effondrées du Mans, quelque mademoiselle de l’Estoile sur la charrette embourbée des comédiens ? N’est-ce pas l’histoire éternelle de la jeunesse et de ses illusions.

La première partie du Roman comique est dédiée au coadjuteur, le cardinal de Retz, qui était des amis de Scarron et le venait visiter assez fréquemment, et la seconde à madame la surintendante, avec qui madame Scarron était en relation d’amitié, ainsi qu’on le voit par un passage d’une lettre de Scarron au maréchal d’Albret. « Madame Scarron a été à Saint-Mandé voir madame la surintendante, et je la trouve si férue de tous ses attraits, que j’ai peur qu’il ne s’y mêle quelque chose d’impur ; mais comme elle n’y va que quand ses amis la mènent, faute de carrosse, elle ne peut lui faire la cour aussi souvent qu’elle le souhaite. » Le succès du Roman comique fut si grand, que La Fontaine ne dédaigna pas d’écrire une comédie des aventures de La Rancune, où il ne fait, le plus souvent, que rimer la prose de Scarron. Le Roman comique est entremêlé de nouvelles fort agréables, imitées ou traduites de l’espagnol : outre celles-là, Scarron en a fait quelques autres tirées du recueil de dona Maria de Layas, intitulé Novelas ejemplares. — Le châtiment de l’Avarice est, pour ainsi dire, une traduction interlinéaire d’El Castigo de la Miseria. Ce n’est pas là, du reste, le seul emprunt que notre poète burlesque ait fait à la littérature d’au delà des monts.

Un volume ne suffirait pas pour mentionner toutes les