Page:Gautier - Les Grotesques, 1856.djvu/70

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Fol est celui qui cherche son malheur,
Et insensé celui de qui le cœur
Vit librement auprès de cette dame.

Quiconque croit amour est malheureux ;
Car, espérant quelque jour d’avoir mieux,
Il perd l’esprit le sens, le corps et l’ame.



Quand il plaira à tes yeux, ma maîtresse,
Qu’avant mes jours je descende là-bas,
La Parque alors, guidant mes derniers pas,
M’abordera aux rives de liesse.

Mais paravant que ta rigueur m’en presse,
Je te supply de ne desdaigner pas
D’ouyr de tous regretter mon trépas,
Dont fut autheur ta fréquente rudesse.

Car quelque amy meu de compassion,
Se souvenant de mon affliction,
Sur mon tombeau gravera ces trois carmes :

« Celuy qui fut d’Angélique amoureux,
« Gyst maintenant cy-dessous plus heureux
« Que s’il vivoit avecque tant d’alarmes.


On voit que Scalion prend les choses tout à fait au sérieux. — L’ami est probablement Philippe Pérault, officiellement chargé de faire les sonnets laudatifs à la tête de chaque livre. Le même Pérault a fait une pièce intitulée ainsi : Élégie de monsieur de Virbluneau et madamoiselle Angélique. On lit ces vers :


Vous qui voulez aimer d’amour chaste et pudique,
Connoissez Virbluneau, espris d’une Angélique ;
Apprenez sa vertu qui luit incessamment,
Au fort du désespoir et angoisseux tourment.
................
Qu’on ne réclame donc qu’un Virbluneau au monde,
Seul vray loyal amant en qui la grâce abonde,