Page:Gautier - Les jeunes France, romans goguenards.djvu/178

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

réparer son manque de convenance par la plus grande des inconvenances.)

madame de m***, un peu radoucie. — Bah ! je mettrai mon collier de topazes ; la monture est large et les anneaux sont serrés ; on n’y verra que du feu.

(Rodolphe lui coupe la parole par un baiser assaisonné de toutes les mignardises imaginables, et conserve cependant un air dolent et mortifié, capable d’apitoyer un roc, et, à plus forte raison, une femme assez compatissante de son naturel.)

madame de m***. — Ne crois pas que je t’en veuille, mon ami ; je ne puis rester fâchée avec toi. (Elle lui rend son baiser, revu, corrigé et considérablement augmenté.) Voilà la signature de ta grâce.

Kling, kling, drelin, drelin !

rodolphe, effaré. — Qu’est-ce ?

madame de m***, du ton le plus tranquille. — Je crois que c’est mon mari qui rentre.

rodolphe. — Votre mari ! Damnation ! enfer ! où me cacher ? N’y a-t-il pas ici quelque armoire ? Y a-t-il moyen de sauter par la fenêtre ? Si j’avais ma bonne dague. (Fouillant dans sa poche.) Ah ! parbleu, la voilà ! Je vais le tuer, votre mari.

madame de m***, qui se recoiffe devant sa glace. — Il n’y a pas besoin de le tuer : aidez-moi à remonter ma robe sur mon épaule, mon corset m’empêche de lever le bras ; bien, passez-moi ce nœud de velours, il cachera la morsure, et maintenant, enfant que vous êtes, allez tirer le verrou, cela aurait l’air singulier d’être enfermés ensemble.