Page:Gautier - Les jeunes France, romans goguenards.djvu/312

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Aussi, lorsqu’on jouait aux petits jeux, et qu’il fallait embrasser quelqu’un par pénitence, c’était toujours lui que les jeunes filles choisissaient en présence de leur mère ou de leur amant.

Ces avantages naturels étaient merveilleusement rehaussés par le costume de leur propriétaire : il portait d’habitude un habit noir râpé, avec des boutons larges comme des tabatières, les bas et la culotte de couleur incertaine ; des souliers à boucles et un chapeau à trois cornes que mon oncle avait porté deux ans avant de lui en faire cadeau.

Ô digne Jacobus Pragmater, qui aurait pu s’empêcher de rire en te voyant arriver par la porte du jardin, le nez au vent, les manches pendantes de ton grand habit flottant au long de ton corps, comme si elles eussent été un rouleau de papier sortant à demi de ta poche ! Tu aurais déridé le front du spleen en personne.

Il nous embrassa selon sa coutume, piqua les joues potelées de Maria à la brosse de sa barbe, me donna un petit coup sur l’épaule, et tira de sa poche un cœur de pain d’épice enveloppé d’un papier chamarré d’or et de paillon qu’il partagea entre Maria et moi.

Il nous demanda si nous avions été bien sages. La réponse, sans hésiter, fut affirmative, comme on peut le croire.

Pour nous récompenser, il nous promit à chacun une image coloriée.

Les galoches de Berthe sonnèrent dans le haut de