Page:Gautier - Les jeunes France, romans goguenards.djvu/335

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bourinent odieusement sur les mollets, ou sur les tibias, si vous n’avez pas de mollets.

Mais, hélas ! tout n’est pas rose dans le métier de réfractaire ; au contraire !

Autant vaudrait être caniche d’aveugle, femme galante, cheval de fiacre, servante de vieille fille, acteur à la banlieue, souffleur au Cirque-Olympique pendant les représentations de Carter, culotteur de pipes, retourneur d’invalides, promeneur de chiens convalescents, journaliste même, si la pudeur permet de s’exprimer ainsi !

Le voleur à la tire, le rinceur de cambriole, ceux qui font la grande soulasse sur les trimards, mènent une vie charmante en comparaison.

Le réfractaire qui avait pris son logement sous le nom d’une femme ou d’une personne partie pour Tombouctou, au risque de voir son prête-nom, femelle ou mâle, lui dérober son acajou, a été dénoncé par un ami de cœur qui mériterait de s’appeler Goulatromba, comme celui du bohème Zafari, dans la pièce de Ruy Blas, ou par son propriétaire, avec lequel il s’est querellé sous prétexte de terme à ne pas payer, ou de réparations à faire.

En vain il s’est intitulé madame Durand, mademoiselle Zinzoline, ou même madame Mitoufflet ; en vain il a essayé d’entrer dans la peau des septuagénaires les plus notoires ; en vain il a tâché de s’escamoter, de s’annihiler, de se supprimer, de se rayer du nombre des vivants, de devenir une ombre impalpable ; le conseil de recensement a les yeux ou-