Page:Gautier - Les jeunes France, romans goguenards.djvu/374

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à la longue, la bosse et l’estompe engendrent la mélancolie ; les yeux blancs des dieux grecs n’ont grande expression ; la sauce est peu variée en elle-même. Si ce n’était l’idée de contrarier mes parents, qui me soutient, je quitterais à l’instant cet affreux métier ! Cela n’est guère amusant, d’aller chercher des cerises à l’eau-de-vie, du tabac à fumer et des cervelas pour ces messieurs, et de s’entendre appeler toute la journée rapin et rat huppé !

III

D’APRÈS NATURE

La semaine prochaine, je peindrai d’après nature. Enfin j’ai une boîte, un chevalet et des couleurs ! Comment prendrai-je ma palette, ronde ou carrée ? Carrée, c’est plus sévère, plus primitif, plus ingresque ; la palette d’Apelles devait être carrée ! Oh ! les belles vessies, pleines, fermes, luisantes ! avec quel plaisir vais-je donner dedans le coup d’épingle qui doit faire jaillir la couleur !… Aïe ! ouf ! quel mauvais augure le globule, trop fortement pressé entre les doigts, a éclaté comme une bombe, et m’a lancé à la figure une longue fusée jaune : il faudra que je me lave le nez avec du savon noir et de la cendre. Si j’étais superstitieux, je me ferais avocat.