Page:Gautier - Lucienne, Calmann Lévy, 1877.djvu/171

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de remercier Jeanne, qui, sans le vouloir, venait de la mettre sur une trace qu’elle cherchait.

— Jeanne n’est pas assez discrète ; je ne puis en aucun cas me servir d’elle, se disait Lucienne, répondant à sa pensée. Mais, dans ce qu’elle m’a dit j’entrevois une lueur…

La pauvre fille pleurnichât toujours en s’essuyant les yeux du coin de son tablier.

— C’est que ça me fait de la peine aussi de quitter madame ! disait-elle.

— Ne te désole pas, voyons, dit Lucienne. Je m’en vais de Paris pour longtemps et il eût fallu, de toute façon, te séparer de moi. Ta mère guérira peut-être, en dépit des médecins, et tu trouveras là-bas un brave garçon qui t’épousera. Allons, va faire tes malles et te reposer.

Jeanne sécha ses larmes, et jeta une bûche sur le feu.

— Monsieur ne vient pas ce soir ? demanda-t-elle.

— Non, dit Lucienne durement.

— Si madame a faim, j’ai préparé un petit souper, reprit Jeanne en approchant du feu un guéridon tout servi.

— Merci, dit Lucienne.

— Madame n’a plus besoin de moi ?

— Non, tu peux t’en aller. Nous réglerons nos comptes demain matin. Ne crains pas de m’éveiller ; j’ai des affaires, et je dois être debout de bonne heure.