Page:Gautier - Lucienne, Calmann Lévy, 1877.djvu/184

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était tendue d’un papier à vignette, où le même chasseur visant le même gibier, se répétait un nombre infini de fois. Le plafond très-bas était tout noirci par la fumée des chandelles et le sable répandu sur le sol, entre les tables carrées recouvertes de toile cirée et les bancs de bois, criait sous les pieds.

Il n’y avait personne encore lorsque Lucienne entra. On mit une serviette sur une table près de la fenêtre, et l’on posa dessus une lourde assiette en terre émaillée, blanche en dedans, noire en dehors, puis un gobelet et un couvert d’étain.

— Je vais vous chercher une chaise, dit l’aubergiste à Lucienne ; le banc de bois vous semblerait trop dur.

Lorsque Lucienne fut installée dans son coin, elle entama la conversation avec la mère Bourguignon, qui allait et venait par la salle, posant des assiettes sur la toile cirée des tables.

— Le climat est-il sain par ici ? demanda-t-elle.

— Si l’air est bon, q’vouss voulez dire ? Il n’est pas mauvais. Nous n’entendons jamais parler d’épidémies.

— Vous avez peu de malades, alors ?

— On est malade tout de même et l’on meurt ici comme ailleurs, dit l’hôtesse. Tenez, v’là la petite aux Conier, des vignerons de par ici, qu’a la rougeole, et ils ont perdu leur vache ces jours-ci ; c’est un vrai guignon ! Et puis il y a la fille au père Grialvat, vous savez, celui qu’on va vendre ; elle est peut--