Page:Gautier - Lucienne, Calmann Lévy, 1877.djvu/242

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

n’osait pas la montrer nue. Tant de crèmes onctueuses, tant de pâtes d’amandes s’étaient écrasées sur cette main ; les ongles avaient été modelés avec tant de soin par les plus habiles manicures ; elle était si souple et si veloutée, d’une blancheur si diaphane, qu’il était difficile de croire qu’elle fût habituée au travail. Lucienne cachait donc ses mains le plus possible, mais elle continuait à les soigner. Adrien les avait souvent comparées aux fleurs des camélias, il y avait appuyé ses lèvres avec une douce ferveur, elle voulait les lui rendre telles qu’il les aimait.

Madame Maton était enchantée de son chapeau.

— Je commence à croire, disait-elle, qu’on ne nous envoyait de Paris que les modes dont personne ne voulait. Jamais je n’ai été aussi bien coiffée qu’aujourd’hui.

— Puisque vous êtes si adroite, je vous donnerai tous mes chapeaux à refaire avant le jour de l’an, dit madame Dumont.

— Mademoiselle est une fée ! s’écria Max ; sous ses doigts les chardons deviennent des roses.

— Fais-moi le plaisir de te taire, dit M. Dumont d’une voix sévère.

Max ne répondit rien, mais il échangea avec sa mère un regard triste.

Il y eut un instant de silence pénible.

Le docteur Dartoc, qui dévorait Lucienne des yeux, le rompit.

— N’êtes-vous pas née à Chagny, mademoiselle ?