Page:Gautier - Lucienne, Calmann Lévy, 1877.djvu/331

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tristait son visage ; ses lèvres se crispaient dans un sourire amer et dédaigneux ; ses yeux avaient un éclat dur, et le froncement de ses sourcils formait un pli à travers son front.

— Que veux-tu, chère amie ? dit-il d’une voix qu’il s’efforçait de rendre douce.

— Je désire ton avis, Adrien, dit madame Després ; comme je ne songe qu’à te plaire, je veux que tout ce que je porte soit de ton goût.

Adrien regarda distraitement les chapeaux qu’on lui montrait, et en désigna un.

— C’est justement le plus joli, dit la jeune femme ; maintenant je n’hésite plus.

La femme de chambre parut dans l’ouverture de la porte.

— Le déjeuner est servi, madame, dit-elle.

— Veux-tu payer mademoiselle, Adrien ? Moi je descends pour ne pas faire attendre ta mère, dit la jeune femme. Vous reviendrez me voir, quand vous passerez par ici, n’est-ce pas ? ajouta-t-elle en saluant Lucienne d’un sourire.

Puis elle s’en alla.

Adrien ouvrit un meuble, déchira un rouleau d’or et posa quelques pièces sur la table. Il agissait avec ces mouvements lents et abandonnés de quelqu’un qui ne s’intéresse plus à la vie.

Lucienne releva brusquement son voile.

— Adrien ! s’écria-t-elle.

Le jeune homme la regarda, pâlit, et un cri sourd s’échappa de ses lèvres. Mais aussitôt un éclair de