Page:Gautier - Militona, Hachette, 1860.djvu/119

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Aldonza tira le verrou, et, se rangeant contre le mur, elle renversa le battant de la porte sur elle pour se couvrir, comme le belluaire qui lâche un tigre dans l’arène, ou le garçon de toril donnant la liberté à une bête de Gaviria ou de Colmenar.

Juancho, qui s’attendait à plus de résistance, entra lentement, un peu déconcerté de n’avoir pas trouvé d’obstacles. Mais un regard jeté sur Andrès, couché sur le lit de Militona, lui rendit toute sa colère.

Il saisit le battant de la porte, auquel se cramponnait de toute sa force la tia Aldonza, qui croyait sa dernière heure arrivée, et la referma malgré tous les efforts de la pauvre femme ; puis il s’appuya le dos à la porte et croisa les bras sur sa poitrine.

« Grand Dieu ! murmura la vieille claquant des dents, il va nous massacrer ici tous les trois. Si j’appelais au secours par la fenêtre ? »

Et elle fit un pas de ce côté. Mais Juancho, devinant son intention, la rattrapa par un pan de sa robe, et, d’un mouvement brusque, la replaqua au mur avec un morceau de jupe de moins.

« Sorcière, n’essaye pas de crier, ou je te tords le col comme à un poulet, et je te fais rendre ta vieille âme au diable ! Ne te mets pas entre moi et l’objet de ma colère, ou je t’écraserai en allant à lui. » Et en disant cela, il montrait Andrès faible et pâle et