Page:Gautier - Militona, Hachette, 1860.djvu/126

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aveu d’amour si noblement jeté en face d’un danger suprême devait-il avoir une telle récompense ? Ne fallait-il pas qu’il protégeât désormais la jeune fille contre les fureurs de Juancho, qui pouvait revenir à la charge et recommencer ses violences ?

Andrès faisait tous ces raisonnements, et bien d’autres ; tout en réfléchissant, il regardait Militona, qui, assise près de la fenêtre, tenait en main quelque ouvrage : car, une fois le trouble des premiers moments passé, elle avait repris sa vie laborieuse.

Une lumière tiède et pure l’enveloppait comme d’une caresse et glissait avec des frissons bleuâtres sur les bandeaux de ses magnifiques cheveux roulés en natte derrière sa tête ; un œillet placé près de la tempe piquait cette ébène d’une étincelle rouge. Elle était charmante ainsi. Un coin de ciel bleu, sur lequel se dessinait le feuillage du pot de basilic, veuf de son pendant lancé à la rue le soir du billet, servait de fond à sa délicieuse figure.

Le grillon et la caille jetaient leur note alternée, et une vague brise, se parfumant sur la plante odorante, apportait dans la chambre un arome faible et doux.

Cet intérieur aux murailles blanches garni de quelques gravures populaires grossièrement coloriées, illuminé par la présence de Militona, avait un charme qui agissait sur Andrès. Cette chaste