Page:Gautier - Militona, Hachette, 1860.djvu/61

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taudis, sinon pour les voleurs, du moins pour les amoureux.

Une simple couche de chaux remplaçait sur la muraille le papier et la tenture ; un miroir dont l’étamage rayé ne reflétait que fort imparfaitement la charmante figure qui le consultait ; une statuette en plâtre de saint Antoine, accompagnée de deux vases de verre bleu contenant des fleurs artificielles ; une table de sapin, deux chaises et un petit lit recouvert d’une courtepointe de mousseline avec des volants découpés en dents de loup, formaient tout l’ameublement. N’oublions pas quelques images de Notre-Dame et des saints, peintes et dorées sur verre avec une naïveté byzantine ou russe, une gravure du Deux-Mai, l’enterrement de Daoiz et Velarde, un picador à cheval d’après Goya, plus un tambour de basque faisant pendant à une guitare : par un mélange du sacré et du profane, dont l’ardente foi des pays vraiment catholiques ne s’alarme pas, entre ces deux instruments de joie et de plaisir s’élevait une longue palme tire-bouchonnée, rapportée de l’église le jour de Pâques fleuries.

Telle était la chambre de Militona, et, bien qu’elle ne renfermât que les choses strictement nécessaires à la vie, elle n’avait pas l’aspect aride et froid de la misère ; un rayon joyeux l’illuminait ; le rouge vif des briques du plancher était gai à l’œil ; aucune ombre difforme ne trouvait à s’accrocher, avec ses