Page:Gautier - Quand on voyage.djvu/78

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

pignon, s’épaulent les unes contre les autres, se montent sur la tête, la belle rue, la rue principale, unique du mont, une rue à ravir d’aise les artistes, à désespérer les philistins ; quelques stupides replâtrages modernes n’ont pu en altérer l’antique physionomie. Au temps où le mont Saint-Michel était un grand but de pèlerinage comme Saint-Jacques de Compostelle, comme Notre-Dame de Lorette, qui voyait accourir de tous les pays de la chrétienté, bourdon en main, coquilles au dos, les dévots pleins de ferveur, ces logis étaient des hôtelleries dont les noms sont conservés dans l’ancien terrier de l’abbaye. Il y avait le Soleil royal, les Trois Rois, l’Image saint Michel, la Maison du Goblin, la Syrène, l’Hôtel Saint-Pierre, la Truie qui file, les Quatre Fils Esmond — sans doute les Quatre Fils Aymonla Coquille, la Licorne, la Tête d’or, ainsi que nous l’apprend M. Édouard Le Hericher, dans sa curieuse et instructive notice sur le mont Saint-Michel. Ce grand nombre d’auberges montre quelle était l’affluence des pèlerins ; en raison de ce concours, il se faisait au mont un commerce assez lucratif d’images, de médailles, de chapelets et autres menus objets bénits que remplacent maintenant les petits travaux en coquillages et en bois sculpté des détenus.

Comme il fallait amasser des forces pour l’ascension