Page:Gautier - Quand on voyage.djvu/83

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

tantôt dans les airs ; vous arrivez à des cœcums, à des portes murées, derrière lesquelles s’accroupissent les vagues terreurs. Le plancher sonne creux sous vos pieds ; vous êtes au-dessus du puits des oubliettes ou plutôt du charnier où se déversait le trop-plein de l’étroit cimetière. Une immense roue, semblable au tread-mill des pénitenciers anglais, se meut vaguement à travers l’ombre, enroulant un câble devant une porte ouverte sur l’abîme et par où l’on ne saurait regarder sans vertige ; c’est le treuil qui sert à hisser les provisions le long d’une gigantesque glissoire que, de terre, on prendrait pour un contre-fort cyclopéen de la montagne. — Tout à l’heure on vous a fait voir sous une voûte sombre la place qu’occupait la fameuse cage de fer qui, soit dit en passant, était une cage de bois où le gazetier Dubourg fut mangé par les rats. Maintenant, on vous montre l’entrée des anciens cachots, aussi noirs, aussi lugubres que les puits de Venise. Plus loin, c’est un escalier mystérieux, éclairé d’un jour crépusculaire et fantastique, qui a servi de thème à un décor de Robert le Diable ; ici, un effet digne de Rembrandt ou de Granet ; là, un précieux détail d’architecture à exercer la sagacité d’un Viollet-Leduc, — L’imagination se figure le moine de Lewis errant, sa lampe en main, sous ces ogives où sem-