Page:Gautier - Spirite (Charpentier 1886).djvu/129

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confondait presque avec le ton de chair de la poitrine. Des diamants scintillaient sur sa tête, à ses oreilles, à son cou et à ses bras. Sur le rebord de velours, à côté de ses jumelles, s’épanouissait un gros bouquet de violettes de Parme et de camélias. Au fond, dans la pénombre, on distinguait un personnage âgé, chauve, obèse, dont le revers d’habit cachait à moitié une plaque d’ordre exotique. La dame vous parlait avec un visible plaisir, et vous lui répondiez d’une façon détachée et tranquille, sans paraître autrement flatté de ses démonstrations plus qu’amicales. Le chagrin de ne pas avoir été remarquée de vous était compensé par la joie de sentir que vous n’aimiez pas cette femme aux yeux hardis, au sourire provocant, à la toilette étincelante.

Au bout de quelques minutes, comme les instruments commençaient à s’accorder pour le second acte, vous prîtes congé de la dame aux diamants et du vieillard à la plaque, et vous revîntes à votre place. La représentation s’acheva sans que vous tourniez la tête, et dans mon âme j’éprouvais comme un mouvement d’impatience contre vous. Je m’étonnais que vous ne deviniez pas qu’une jeune fille en toilette blanche, relevée d’agréments bleus, désirait fort être aperçue par le seigneur qu’elle s’était secrètement choisi. Depuis si longtemps je souhaitais me trouver dans le même endroit que vous ! Ce vœu