Page:Gautier - Spirite (Charpentier 1886).djvu/13

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bruit perceptible était le sifflement d’un jet de gaz sortant d’une bûche et le tic-tac de la pendule dont le balancier rhythmait le temps à voix basse.

On était en hiver ; la neige récemment tombée assourdissait le roulement lointain des voitures, assez rares dans ce quartier désert, car Guy habitait une des rues les moins fréquentées du faubourg Saint-Germain. Dix heures venaient de sonner, et notre paresseux se félicitait de ne pas être en habit noir et en cravate blanche debout dans une embrasure de croisée au bal de quelque ambassade, ayant pour perspective les maigres omoplates d’une vieille douairière trop décolletée. Bien qu’il régnât dans la chambre une température de serre chaude, on sentait qu’il faisait froid dehors, rien qu’à l’ardeur avec laquelle brûlait le feu et au silence profond des rues. Le magnifique angora, compagnon de Malivert en cette soirée de farniente, s’était rapproché du foyer à roussir sa blanche fourrure, et le garde-feu doré l’empêchait seul de se coucher dans les cendres.

La pièce où Guy de Malivert goûtait ces joies paisibles tenait le milieu entre le cabinet d’étude et l’atelier. C’était une salle vaste et haute de plafond, qui occupait le dernier étage du pavillon habité par Guy et situé entre une grande cour et un jardin planté de ces arbres séculaires dignes d’une forêt royale, et qu’on ne trouve plus que dans l’aristocratique faubourg, car il faut du