Page:Gautier - Spirite (Charpentier 1886).djvu/149

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mencèrent à se mouvoir d’eux-mêmes sans que son cerveau leur dictât rien. À sa pensée s’était substituée celle de Spirite.


Dictée de Spirite.


… Je ne voudrais pas vous ennuyer d’une façon posthume en vous racontant toutes mes déconvenues. Un jour, cependant, j’eus une joie bien vive, et je crus que la destinée malicieuse qui semblait se faire un jeu de me dérober à vos regards allait cesser ses taquineries. Nous devions dîner le samedi suivant chez M. de L… Le fait m’eût été bien indifférent si je n’eusse appris dans la semaine par le baron de Féroë, qui venait quelquefois à la maison, que vous deviez faire partie de cette agape moitié mondaine, moitié littéraire ; car M. de L… se plaisait à recevoir des artistes et des écrivains : c’était un homme de goût, un connaisseur en livres et en peintures, qui avait une bibliothèque et un cabinet de tableaux d’un choix irréprochable. Vous alliez quelquefois à ses soirées ainsi que plusieurs auteurs célèbres ou en train de se faire un nom. M. de L… se piquait de savoir découvrir les talents, et il n’était pas de ceux qui ne croient qu’aux réputations toutes faites. Je me disais dans mon exaltation enfantine : « Enfin je le tiens ce fugitif, cet insai-