Page:Gautier - Spirite (Charpentier 1886).djvu/167

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j’eusse bien sincèrement et du fond du cœur fait le sacrifice de toute attache humaine, une blancheur de mort couvrit mon visage lorsque l’acier des ciseaux grinça dans ma longue chevelure blonde étalée que soutenait une religieuse. Les boucles d’or tombaient à flocons épais sur les dalles de la sacristie où l’on m’avait emmenée, et je les regardais d’un œil fixe pleuvoir autour de moi. J’étais atterrée et pénétrée d’une secrète horreur. Le froid du métal, en m’effleurant la nuque, me faisait tressaillir nerveusement comme au contact d’une hache. Mes dents claquaient, et la prière que j’essayais de dire ne pouvait parvenir à mes lèvres. Des sueurs glaciales comme celles de l’agonie baignaient mes tempes. Ma vue se troublait, et la lampe suspendue devant l’autel de la Vierge me semblait s’éteindre dans un brouillard. Mes genoux se dérobèrent sous moi, et je n’eus que le temps de dire, en étendant les bras comme pour me raccrocher au vide : « Je me meurs. »

On me fit respirer des sels, et quand je revins à moi, étonnée des clartés du jour comme une ombre sortant du tombeau, je me trouvai entre le bras des sœurs qui me soutenaient avec un empressement placide et comme accoutumées à de pareilles défaillances.

« Cela ne sera rien, me dit d’un air compatissant la plus jeune des sœurs. Le plus difficile est