Page:Gautier - Spirite (Charpentier 1886).djvu/229

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lorsque, le bateau à vapeur entrant dans la rade du Pirée, il découvrit le merveilleux tableau qu’éclairait le matin : le Parnès, l’Hymette, formaient, avec leurs pentes couleur d’améthyste, comme les coulisses, du splendide décor dont le Lycabète, bizarrement découpé et le Pentélique occupaient le fond. Au milieu, comme un trépied d’or sur un autel de marbre, s’élevait sur l’Acropole le Parthénon illuminé par les lueurs vermeilles du matin ; les teintes bleuâtres des lointains, apparaissant à travers les interstices des colonnes écroulées, rendaient encore plus aérienne et plus idéale la noble forme du temple. Malivert eut le frémissement que donne la sensation du beau, et il comprit ce qui jusqu’alors lui avait semblé obscur. Tout l’art grec se révélait à lui, romantique, dans cette rapide vision, c’est-à-dire la parfaite proportion de l’ensemble, la pureté absolue des lignes, la suavité incomparable de la couleur faite de blancheur, d’azur et de lumière.

Aussitôt débarqué, sans s’occuper de ses bagages, laissés au soin de Jack, il se jeta dans un de ces fiacres qui, à la honte de la civilisation moderne, emportent, à défaut de chars antiques, les voyageurs du Pirée vers Athènes sur une route blanche de poussière et bordée çà et là de quelques oliviers enfarinés. Le véhicule de Malivert, tout démantelé et rendant un son inquiétant de ferraille, était emporté au galop par deux petits