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Montmartre, transformé en atelier aérostatique. L’Élysée-Montmartre est ou plutôt était une sorte de Mabille suburbain, car maintenant qui songe à la danse ! Le jardin qui l’entoure est peuplé de statues mythologiques en plâtre peint à l’huile, dont la nudité frissonne à la bise d’octobre. Une immense salle abritait, pendant les soirées pluvieuses, les chorégraphies excentriques des Brididis et des grisettes de banlieue, et c’est là que l’atelier s’est installé.

Les murs en sont ornés de peintures à la détrempe représentant, dans des cadres d’architectures, des fleurs et des plantes exotiques ; derrière l’orchestre s’arrondit un temple demi-circulaire aux blanches colonnes, se détachant d’un fond de sombre verdure. Les lustres pendent encore du plafond à demi dédorés et portant, au lieu de globes en verre dépoli, des boules de paillon vert et rouge. Les salles de bal ne sont jamais gaies le jour : la lumière du soleil leur nuit comme aux femmes. Mais l’Élysée-Montmartre, animé par le travail, offrait, malgré la lividité du jour, un spectacle plein d’intérêt et de vie.

Une soixantaine d’ouvrières, la plupart jeunes, quelques-unes jolies, et toutes mises avec une