Page:Gautier Siraudin - Un voyage en Espagne.djvu/26

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moi… je souscrirai avec plaisir pour ton monument. Holà ! quelqu’un ! La fille !… Personne ne vient ! À la boutique, s’il vous plaît !… Personne ! J’attendrai… (Il s’asseoit.) Enfin ! je suis donc en Espagne, dans cette patrie de la cigarette… Désiré Reniflard !… tes vœux sont exaucés… tu respires le même air que le Cid… Oh ! le Cid, c’est mon héros… Figure-toi, vieux Cid, que j’avais à Paris une profession ridicule… Je tenais un établissement à trois sous la séance… un cabinet de lecture. Depuis deux ans, je m’occupais sans relâche à dévorer mon fonds… intellectuellement : Victor Hugo, Alfred de Musset, Prosper Mérimée, lord Byron, je vous ai lus et relus ; vous m’avez monté la tête… vous m’avez inspiré l’amour de la couleur locale… Oh ! la couleur locale… Je ne rêvais que villes gothiques, à la silhouette tailladée en scie, qu’Alcazars moresques, aux colonnettes et aux trèfles de marbre, clochers en spirale, créneaux festonnés… Je ne rêvais qu’orangers aux pommes d’or, que grenadiers aux fruits de corail, que bandits, contrebandiers, gitanos, et surtout qu’Andalouses au sein bruni, pâles comme un beau soir d’automne… Vous savez le reste… Je n’y puis plus tenir… je confie mes bouquins à une personne sûre… Je franchis les monts en disant comme Louis XIV : Il n’y a plus de Pyrénées… et je n’ai pas plutôt posé le pied sur la terre espagnole, qu’on me l’écrase, le pied… C’est égal, cela ne m’arrêtera pas. Je suis venu en Espagne étudier la couleur locale, et faire un voyage d’agrément. Oh ! l’Espagne !…


Air de M. A. de Wailly.

J’ai soif de la couleur locale,
J’ai faim de l’Espagne au ciel bleu ;
Je ne rêve qu’Orientale,
Soleil d’or et regard de feu !