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— Tu comprendras. Écoute : Le sauvage est patient, et rarement son ennemi lui échappe. Aussi, à cette heure, justice est faite, et l’obstacle à la réalisation de mes projets est disparu, comme le nuage disparaît poussé par un vent du Sud-Ouest. En ce moment, frère, le Hibou est tombé mort sur le champ où les vautours iront bientôt s’unir aux vers pour dévorer la chair de bandit. Va maintenant auprès de Fleur-du-mystère ; le sommeil a appesanti sa paupière ; va, dis lui tout, et fuyez ensemble.

— Malheureux ! dit Laurent. Quoi ! un crime ! du sang !

— Va, mon frère, et que ta langue se repose, ne la fatigue pas inutilement. Moins de mots et plus d’actions ; cours, mon frère ; l’heure de la délivrance est venue pour moi, parce que je l’ai voulu. Je n’ai pas de regret. Demande à l’aigle qui a saisi sa proie s’il regrette son action. Ainsi de moi. J’ai fondu sur mon ennemi qui était celui de Fleur-du-mystère, et aujourd’hui que ma vengeance est satisfaite, je vois mon rêve se réaliser : libres, vous allez fuir vers le village d’où part Fleur-du-mystère, et vous y serez heureux. Va, mon frère, ne retarde pas l’heure de la délivrance. L’alouette ne se fait pas prier pour s’enfuir des serres du vautour qu’un chasseur a abattu du haut des airs.

Resteras-tu donc ainsi immobile comme un cèdre de la forêt, sans énergie, sans actions ! comme le castor devenu vieux ? Non, cours au wigwam de Fleur-du-mystère. Dis lui que le Hibou n’est pas