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sauvages, avec sa Tour droite et corsée dont les rayons lumineux tracent aux navires transatlantiques et à nos bateaux de commerce, une route sûre à travers les écueils et les courants qui abondent à ces endroits. À gauche, l’Isle Verte, humble village encore, au pied d’une côte qui s’en va, par gradation, se confondre à l’horizon avec le bleu transparent du ciel. La chapelle s’élève au centre du village et son clocher se dresse dans les airs. À droite, la rive Nord, énormes murailles crénelées par la main de la nature, puis le Saguenay, cette rivière aux merveilles ; enfin Tadoussac, ce petit nid d’aigle au bord de la mer, encore tout chaud de souvenirs glorieux du Père LaBrosse, l’apôtre si connu.

Tout ce tableau, illuminé des derniers rayons du soleil couchant, se déroulait aux yeux éblouis de Laurent et de Fleur-du mystère, à leur station sur le bout de l’île-aux-pommes. Ajoutez à cela l’air frais, pur et embaumé du soir, le calme majestueux de la mer qui se retire lentement, le chant des oiseaux sur l’île, uni aux cris des goélands sur les flots, les pâles clartés de la lune pleine qui semble courir après le soleil dont les vestiges de lumière dorent à peine les rares nuages disséminés à l’horizon, et vous aurez une idée des émotions qui naquirent alors dans l’esprit de nos fugitifs.

Quand l’heure du repos fut arrivée, Laurent alla lui-même faire ample provision de branches de sapin pour faire à Fleur-du-mystère un lit convenable