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UN VŒU.


Le matin du départ de Laurent avec Fleur-du-mystère, le soleil avait émergé à l’horizon d’une mer de feu pour s’élancer radieux dans l’azur du ciel.

À la cabane du Hibou, la vieille sauvagesse s’était éveillée de bonne heure, et elle en sortit bientôt pour aller dans la forêt cueillir des herbes salutaires d’un pouvoir magique et que seule elle connaissait. Personne ? dit-elle en sortant ; ils ont donc pris leur bord, eux aussi ? Le Hibou a peut-être amené la petite aux loups-marins ; et regardant la mer : au fait il y a plusieurs canots qui errent là bas, au large. Ils reviendront. Elle gagna le bois. Ce n’était partout que chants harmonieux, douces senteurs et amoureuses fraîcheurs ; la mer avait ses voix, la forêt ses murmures et les oiseaux babillards s’éveillaient dans la feuillée, comme les goëlands rasaient en criant la surface unie de la mer.

Allons ! dit-il la vieille, mes membres usés me refusent leur service, il faut que je les soigne. L’éléphant âgé cherche le cimetière pour y mourir, moi je ne veux pas aller dans le pays des mânes et je cherche les herbes salutaires qui donneront de la vigueur à mes membres défaillants.

Ainsi parlait la vieille sauvagesse, hideuse et sale personne, à la figure osseuse et pleine de rides. Son front plissé horizontalement jusqu’aux tempes ; sa poitrine, à nue, laisse voir une peau brûlée par les feux du soleil ou cuite par la fumée qui remplit sa