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jour ; l’intérêt et les passions expirent avec son âme. Pour ma part, à la veille de rendre mon esprit à mon créateur, je ne désire que faire connaître ce que je ressens et ce que je pense. Je ne prendrais pas ce parti, si je ne craignais qu’on représentât mes sentiments sous un faux jour…

« Je meurs sans remords. Je ne désirais que le bien de mon pays dans l’insurrection, et son indépendance. Mes vues et mes actions étaient sincères… Depuis dix sept ou dix-huit ans, j’ai pris une part active dans presque toutes les mesures populaires, et toujours avec conviction et sincérité. Mes efforts ont été pour l’indépendance de mes compatriotes.

Nous avons été malheureux jusqu’à ce jour. La mort a déjà décimé plusieurs de mes collaborateurs. Beaucoup sont dans les fers, un plus grand nombre, sur la terre de l’exil, avec leurs propriétés détruites et leurs familles abandonnés, sans ressources, à la rigueur des froids d’un hiver canadien. Malgré tant d’infortunes, mon cœur entretient son courage et des espérances pour l’avenir. Mes amis et mes enfants verront de meilleurs jours ; ils seront libres !… Un pressentiment certain, ma conscience tranquille me l’assure. Voilà ce qui me remplit de joie, lorsque tout n’est que désolation et douleur autour de moi. Les plaies de mon pays se cicatriseront ; après les malheurs de l’anarchie et d’une révolution sanglante, le paisible Canadien verra renaître le bonheur et la liberté sur le Saint Laurent. Tout concourt à ce but,