Page:Gauvreau - Captive et bourreau, paru dans La Gazette des Campagnes, 1883.pdf/49

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— Oh ! Mademoiselle, j’aurais voulu prendre votre âme, si elle s’était échappée au milieu de votre chanson.

— Vous auriez eu fort à faire, M. George, car voyez-vous, c’est quelque chose de subtil ; vous devez savoir cela, vous qui avez fait votre philosophie ?

Tout en parlant ainsi, elle quittait son siège et venait s’asseoir auprès de George, tout interdit à cette marque d’estime.

— Mademoiselle, le sceptique en vous entendant, croirait à Dieu. Votre voix, surtout à l’église, modulant le « Requiem » de Mozart, ravirait au troisième ciel, comme le fut St Pierre. Moi, je crois plus, votre chant me dit la bonté de votre cœur, car il me semble qu’il n’y a que les cœurs aimants et sincères qui peuvent faire passer ainsi leur âme dans un chant mélodieux par sa nature.

Que de choses agréables vinrent alors les unir dans une conversation où Alexandrine avait toujours la palme. Pauvre Mélas ! il avait eu le bonheur de voir Alexandrine tout auprès de lui, c’était au tour de George maintenant. C’était au tour de Mélas à soupirer et à lancer des œillades aux nouveaux heureux. Il enviait, lui aussi, les heures heureuses qui coulèrent si rapides pour George et si lentes pour lui-même, relégué dans un coin, écoutant les interminables paroles du Notaire Boildieu, sur les emprisonnements que le tyran Craig exerçait au mépris de toute bonne et saine politique. Les paroles du Notaire se perdent au milieu de ses idées con-