Page:Gauvreau - Captive et bourreau, paru dans La Gazette des Campagnes, 1883.pdf/82

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

comme autrefois dans l’humble chapelle du Séminaire. Les souvenirs montent à flots pressés et envahissant son âme ; une sensation étrange agite tout son être et le tient dans une prostration poignante. Le cœur lui fait mal, il a un serrement de gorge qui empêche les sanglots de passer et l’étouffe ; sa prière ardente expire sur ses lèvres ; enfin, les larmes se font un libre passage ; il est soulagé puisqu’il pleure. Ses larmes tombent une à une sur le plancher du temple, et sa prière de feu fait descendre dans son âme un rayon d’espoir ; tout absorbé en lui, au milieu des souvenirs qu’il évoque, il n’aperçoit pas une ombre se glissant au saint lieu ; cette ombre s’est agenouillée près de lui.

George continue à pleurer, en priant au pied de la Madone à qui il confie sa vie et celle qu’il aime autant sinon plus que lui-même ici-bas. Pauvre enfant ! elles sont douces ces larmes du cœur ; pourtant c’est le brisement du départ, ce sont les sanglots des adieux. Es-tu seul à pleurer et à demander à l’humble femme de Nazareth secours et protection !

Combien de temps passa t-il ainsi aux pieds de la Vierge Marie que tout chrétien invoque comme sa mère et qui veille surtout sur les marins ? Il ne le sut pas lui même.

Soudain, une main s’est détachée de l’ombre agenouillée près du pilastre, et cette main a effleuré l’épaule de George.

— Ma mère ? murmura-t-il tout haut.

— Non, George, c’est moi, ton Alexandrine.

— Mon Dieu ! pourquoi cette joie au milieu de ma douleur, comme un rayon du soleil dans la nuit