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Page:Genlis — Mémoires inédits, (ed. Ladvocat), T2.djvu/108

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Turcs les franchissent avec impétuosité ; plusieurs d’entre eux, qui étoient des domestiques et des paysans, portoient des flambeaux ; ils ouvrent les portes ; plus de trois cents Turcs remplissent le jardin ; les hommes de la société enlèvent les dames ; les autres enlèvent une douzaine de femmes de chambre mêlées avec nous pour faire nombre. J’ai toujours détesté la confusion et les bagarres, même dans les jeux ; cette escalade me déplut mortellement et me fit peur ; je craignois que quelqu’un ne se cassât la jambe ; et, voyant plusieurs Turcs s’approcher assez brutalement de nos vestales, je trouvai toute cette invention détestable. Dans cette mauvaise disposition d’humeur, j’aperçus à la lueur des flambeaux, M. de Caraman tout étincelant d’or et de pierreries, mais que le turban n’embellissoit pas, et qui vint à moi d’un petit air vainqueur, qui acheva de me mettre en colère. Je me refusai très-sérieusement à l’enlèvement, et ce fut avec si peu de grâce, qu’il en fut excessivement piqué. Il me saisit ; je me débats, je le pince, je l’égratigne, je lui donne des coups de pieds dans les jambes ; il devient furieux, et m’emporte bien véritablement malgré moi.